Puisque tu souhaites que tout d'abord je me présente, je dirai que j'ai 49 ans, suis mère de deux adolescents de 14 et 16 ans, que j'admire pour ce qu'ils sont malgré la maladie de leur mère. J'adore mon rôle de mère, même si je doute d'être à la hauteur. Je travaille comme secrétaire de direction. En raison de la maladie, j'ai dû hélas quitter un poste très intéressant et travaille depuis septembre à mi-temps car mon énergie ne suffit plus. Si toutefois je n'ai pas choisi ce métier, j'en suis actuellement ravie, car mon expérience professionnelle me permet tout particulièrement de " gérer " l' Union Française des Adhérents Fibromyalgiques, qui demande rigueur, esprit d'analyse et sens des relations.
En effet, je voulais faire les Beaux Arts : un regret qui me pince le cœur, car mon bonheur est un peu camouflé derrière ce rêve ! J'en veux pour exemple les sentiments profonds que je ressens devant une exposition !
Quelle est l'origine de ton handicap ?
Peut-être que je souffre de fibromyalgie depuis l'âge de 14 ans, au moment où la famille justifiait les douleurs musculaires que je présentais par la croissance. Mes douleurs étaient intenses et ma fatigue en classe, visible. Toutefois, paradoxalement, entre 18 et 25 ans, je débordais d'énergie, même trop ! Puis, à 26 ans, j'ai réalisé que je ne résistais pas comme mes amis lorsque je me couchais tard. J'avais besoin de nettement plus longtemps qu'eux pour récupérer. Lorsque mon fils est né, il m'a fallu plus d'un an pour avoir le sentiment que mon corps retrouvait du tonus ! J'étais dans un état de fatigue extrême, imputé par le corps médical au bébé qui dormait mal ! Pendant l'accouchement de ma fille, je me " suis auto-anesthésiée " - d'après les médecins ! C'est à dire que je n'ai plus senti les contractions pendant 20 minutes ! Mon corps était déconnecté : j'entendais tout, j'étais consciente de mon environnement, mais je ne pouvais pas communiquer et surtout je ne sentais plus rien ! Lorsque ma fille a eu trois mois, je ne pouvais pas la soulever de son lit à cause des vertiges importants que la position penchée provoquait. Je souffrais atrocement de l'œil droit et je ne pouvais pas appuyer sur une fourchette avec ma main gauche. Lorsqu'elle a eu 8 mois, j'ai été hospitalisée en urgence en neurologie, mes jambes me faisant souffrir au delà du supportable et une sclérose en plaques a été évoquée.
(tous ces détails, qui peuvent paraître excessifs, sont nécessaires pour comprendre la difficulté de diagnostiquer la fibromyalgie).
Je suis restée 8 ans avec des troubles qui variaient en intensité et en gêne. Avec au fond de mon esprit la crainte de voir se réveiller une S.E.P. Enfin, il y a 5 ans, je me suis étonnée de ne pas pouvoir monter plus d'un étage : mes muscles devenaient durs comme du béton. En marchant à plat aussi d'ailleurs ! J'ai commencé à trembler à l'effort, car mes muscles durcissaient. Tenir une tasse et la porter à la bouche devenaient un art ! Heureusement que nous vivons dans l'humour car, très souvent, mes tentatives de faire les gestes quotidiens de la vie se terminaient en grand éclat de rire de ma part ! Je crois que cette bonne humeur " pathologique " m'aide énormément. Je dois ici souligner que je suis particulièrement soutenue par mon environnement affectif.
La dépression m'a épisodiquement gagnée quand je suis allée de médecins en médecins, en premier pour réexaminer cette " hypothèse " de sclérose en plaques, et en second, afin d'obtenir une explication pour ces douleurs et un justificatif pour la fatigue qui me gagnait de plus en plus… Tout était devenu effort ! Les réponses évasives du corps médical, persuadé que je présentais le tableau clinique d'une " dépression masquée ", m'enfonçaient dans la déprime. Comment moi, si dynamique et heureuse, pouvais-je souffrir d'une dépression euh !!!! masquée….. Qu'est ce que j'avais donc à me cacher ? J'ai donc accepté pendant 5 ans les traitements divers pour dépression, arrivant à des doses massives de traitements, dont les effets secondaires se confondaient avec mes propres troubles ! J'ai fait thérapies et analyse !
J'ai alors lu un livre sur la dépression masquée et un autre sur la sclérose en plaques ! Je me suis surtout reconnue dans le second ! Nouvelle angoisse ! Et si le médecin me mentait ? J'ai donc résisté, résisté aux traitements car moi seule savais comment mon corps se comportait ! Il était clair que mon corps disjonctait !
Et, il y a deux ans aujourd'hui, un pneumologue, chargé de comprendre pourquoi j'avais de telles difficultés respiratoires, m'a parlé de fibromyalgie ! Il m'a lu 4 pages dans un livre de médecine ! On parlait de moi dans cet ouvrage ! J'avais enfin un nom sur mon état, j'allais pouvoir en parler et comprendre.
J'ai alors rejoint l'Association des Fibromyalgiques de ma région et me suis investie dans le Bureau de cette structure, dont je suis actuellement Présidente. Depuis, je me bats sans discontinuer pour une reconnaissance de cette pathologie comme entité ! Et, pour aller plus loin, j'ai accepté d'être Délégué Général de l'Union Française des Adhérents Fibromyalgiques. Je ne peux pas pour ma part admettre que, pendant 14 ans, on m'ait laissée sans diagnostic ! Qui souhaiterait ainsi gâcher sa vie (et celle de ses proches) pendant si longtemps ?
Mon combat, né en octobre 1999, est devenu celui de tous les fibromyalgiques qui ont confiance en moi et me soutiennent !
Quant et comment est né votre projet ?
Avant d'aller plus loin je souhaiterais ici résumer plus particulièrement mon engagement au sein de l'Union Française des Adhérents Fibromyalgiques par cette belle phrase de Sénèque :
" Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles que nous n'osons pas,
mais parce que nous n'osons pas qu'elles sont difficiles ".
Notre réflexion de créer une Union d'Associations.