JOURNAL L'INDEPENDANT. (VENDREDI 22 NOVEMBRE 2002)
Le combat d'une Sigeanaise contre une maladie rare
A 54 ans, Michèle mène une vie au ralenti, imposée par une maladie orpheline, qui serait en relation avec l'aluminium de certains vaccins.
Comme 80 autres malades, elle a déposé plainte. A 54 ans, Michèle Hyolle a l'impression de vivre l'existence d'une femme de 75 ou 80 ans.
"Je n'en peux plus. Je ne peux pas dormir ; la position assise me fait souffrir ; je ne peux plus marcher et j'ai des brûlures en permanence dans tout le corps". Et de temps à autre "je plonge dans un sommeil comateux qui peut durer de 2 h de l'après-midi à 20 h, dont je mets une heure à sortir et sans avoir aucun souvenir de ce qui m'est arrivé". Ou bien, raconte-t-elle, "mes muscles lâchent et je tombe, comme l'autre jour en allant à la boulangerie". Sa maladie, une "myofaciite à macrophages" a été identifiée un peu par hasard, dit-elle. Atteinte par ailleurs d'une sclérose en plaque et d'une hépatite C, cette Niçoise d'origine, qui a longtemps vécu à Dijon avant de s'installer à Sigean où sa misère physique est "plus supportable au soleil", a pu mettre un nom sur ses souffrances après une émission médicale vue par son mari. "Il a reconnu dans les symptômes décrits ceux que je présentais". Une maladie orpheline. Une biopsie musculaire devait confirmer ce diagnostic et révéler l'origine de la maladie. A savoir, la présence d'hydroxyde d'aluminium dans les muscles, qui a pour conséquence de mobiliser 24 heures sur 24 heures les macrophages (globules blancs) des muscles destinés à éliminer les virus de l'organisme et les effets d'une très grosse grippe chronique : douleurs musculaires permanentes, fatigue invalidante, période de fièvres, ralentissement du cerveau et bien d'autres symptômes encore. Comme il s'agit d'une maladie orpheline identifié qu'en 1993, aucun traitement n'existe et l'on ne connaît pas son évolution.
Toujours est-il que Patricia Baslé, présidente de l'association "Entraide aux malades de myofasciite à macrophages" (basée en Côtes d'or) à laquelle Michèle Hyolle a adhéré, est elle-même reconnue invalide à 80 % par la Cotorep. La Sigeanaise, déjà persuadée d'une relation directe de la sclérose en plaques dont elle est atteinte, avec le vaccin contre l'hépatite B qu'elle a reçu en 1996, est aujourd'hui convaincue, comme les 130 membres de l'association "AE3EM", d'un lien direct entre la myofasciite à macrophages et l'aluminium, contenu dans certains vaccins, y compris dans celui de l'hépatite B. C'est en tout cas l'hypothèse développée par plusieurs chercheurs autour du professeur Chérin, clinicien en médecine interne à la Pitié-Salpétrière à Paris, qui a créé le Germmad, "groupe de recherche sur les maladies musculaires acquises et dysimmunitaires". D'autres chercheurs, comme le professeur Ghérardi, s'interrogent sur une relation éventuelle du syndrome de la guerre du Golf et l'aluminium des vaccins. 80 plaintes déposées auprès du TGI de Paris. À ce jour, un collectif de 80 malades de la myoflaciite à macrophages (dont des adolescents) a déposé plainte, au pénal, contre X, auprès du doyen des juges, au TGI de Paris, "pour atteinte à l'intégrité de la personne" et "administration de substance nuisible". Me Collard qui représente le collectif confirme que "la plainte est actuellement à l'instruction et le juge nous a dispensés de caution, ce qui est rare". "Des experts vont être nommés", pour établir, précise-t-il, s'il existe réellement un lien avec l'aluminium des vaccins et la maladie. Le dossier est aussi délicat que celui concernant l'hépatite B et la sclérose en plaque. Et il pourrait être aussi détonnant. L'association de son côté mène son combat. Elle veut sensibiliser les médecins généralistes à cette maladie encore méconnue, pour éviter "aux malades des parcours médicaux interminables, douloureux et des examens coûteux". "Nous ne sommes pas anti-vaccins". Comme l'explique Me Collard, "la plupart des médecins évoquent des problèmes psychologiques". "Nous demandons une information et une formation de tous les praticiens" renchérit Patricia Baslé qui veut arriver à faire reconnaître la maladie, mais aussi parvenir à faire supprimer l'aluminium des vaccins, tout en rappelant "nous ne sommes pas anti-vaccins, nous souhaitons simplement que d'autres adjuvants remplacent l'hydroxyde d'aluminium". Ce que l'association demande aussi, c'est que le suivi des patients (350 cas sont diagnostiqués en France et six nouveaux apparaissent par semaine) puisse se faire dans des centres proches de leur domicile. Pour l'instant, ils doivent se rendre à Paris ou à Marseille, ce qui constitue un parcours du combattant pour des personnes aussi diminuées physiquement. Ces deux actions, judiciaire et associative, risquent d'être très longues. En attendant, Michèle Hyolle mène, à Sigean, une vie au ralenti, "sans distraction, sans projet, c'est dramatique". Sans compter ajoute-t-elle, que "j'ai perdu mon travail et l'espoir de toucher une retraite pleine".