02-01-2010
Point Net
Mourir de la grippe ou du vaccin ?
Comme dans toutes les morts «troublantes», on ne sait pas encore grand-chose de la disparition de la femme médecin du CHU de Sétif. On sait seulement qu'elle était en bonne santé, que ses compétences sont reconnues et son dévouement apprécié de tous.
Cela ne doit pas soulager la douleur de ses enfants, de son époux et des malades qui ont eu à bénéficier de ses précieux services. Pour ceux qui ne la connaissent pas, ils doivent quand même avoir une pensée émue pour cette femme partie à la fleur de l'âge.
Ce n'est pas tout pour autant, car si on ne sait pas encore grand-chose des conditions exactes de sa mort, on sait quand même le plus inquiétant : la défunte, quelques heures avant de rendre l'âme, s'était faite vacciner contre la grippe A/H1N1.
On angoissait déjà terriblement que la potion préventive nous parvienne si tard. Puis, on a angoissé un peu plus que les procédures de contrôle de conformité du vaccin dans les laboratoires de l'Institut Pasteur prennent autant de temps. Quand ça traîne, c'est qu'il y a un problème, nous avons appris à l'intégrer depuis des années et pas seulement dans les opérations de santé publique.
Comme nous avons aussi appris à pencher plutôt du côté des scénarios catastrophe, il sera difficile de nous convaincre que la praticienne du CHU de Sétif n'a pas succombé aux «effets secondaires» d'un vaccin dont on ne peut pas dire qu'il est sans risque.
Déjà qu'il est loin de faire l'unanimité dans les pays les plus développés, on ne voit pas comment les Algériens à la suspicion légendaire vont tendre le bras ou le bras devant autant de périlleuses incertitudes. Maintenant que des
médecins peuvent en mourir – que la cause du décès du médecin sétifien se confirme ou non, le coup est déjà parti – et que le personnel médical de Blida et de plusieurs autres wilayas refuse tout bonnement de «servir de cobayes», on ne sait pas vraiment pourquoi les citoyens ordinaires, qui ne sont ni médecins ni infirmiers vont consentir à recevoir la dose censée les mettre à l'abri de l'épidémie.
Il reste l'essentiel, bien sûr pour rassurer et surtout pour que la maladie ne fasse pas trop de dégâts. Et «l'essentiel» est dans la prise en charge des malades après avoir convaincu que la grippe porcine est loin d'être la mort subite, qu'elle se soigne plutôt bien et que le Tamiflu est disponible en quantités industrielles. C'est sûrement de n'avoir pas commencé par là qu'on en est arrivé là, mais il n'est peut-être pas si tard.